Par cet arrêt, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur le caractère communicable des documents établis par les services de police municipale.
S’agissant de la qualification de ces documents, il distingue les rapports et procès-verbaux destinés à être transmis au procureur de la République des autres documents.
Il indique ainsi que « les documents produits par les agents de police municipale dans l’exercice de leur mission de service public, notamment ceux par lesquels ils rendent compte des opérations de police administrative qu’ils effectuent, de leur propre initiative ou à la suite d’un signalement, à des fins de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques, sur le fondement de l’article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, ont en principe le caractère de documents administratifs, quand bien même ils seraient par la suite transmis à une juridiction ».
En revanche, « les rapports et procès-verbaux mentionnés à l’article 21-2 du code de procédure pénale, par lesquels les agents de police municipale constatent ou rendent compte d’une infraction pénale, qu’ils transmettent au procureur de la République, le cas échéant par l’intermédiaire des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, ne sont pas détachables de la procédure juridictionnelle à laquelle ils participent et ne constituent donc pas des documents administratifs ». Ces documents ne sont donc pas communicables.
S’agissant du régime des documents qualifiés de documents administratifs, le Conseil d’Etat rappelle que ceux-ci sont communicables sous réserve des exceptions mentionnées aux articles L. 311-2, L. 311-5 et L. 311-6 du Code des relations entre le public et l’administration.
L’administration doit notamment occulter ou disjoindre les mentions dont la communication est susceptible de porter atteinte au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou de leurs opérations préliminaires, sauf autorisation donnée par l’autorité compétente.
Lorsque le demandeur n’est pas la personne intéressée par les documents, doivent également être occultées ou disjointes les informations dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée d’autres personnes, celles qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une autre personne physique désignée ou facilement identifiable et celles faisant apparaître le comportement d’un tiers dès lors que la divulgation de ce comportement lui porterait préjudice.
Par ailleurs, l’administration peut refuser la communication de documents administratifs lorsque celle-ci ferait peser sur elle une charge de travail disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose. Pour déterminer si cette charge est excessive, le juge prend en compte l’intérêt qui s’attache à cette communication pour le demandeur et pour le public.
En l’espèce, une habitante demandait à une commune la communication de l’intégralité des rapports d’intervention et mains courantes établis par la police municipale et leurs pièces jointes à la suite de chacune de ses demandes d’intervention formulée en vue de la constatation de troubles de voisinage.
Elle avait contesté le refus de communication opposé par la commune devant le Tribunal administratif de Bordeaux. Celui-ci ayant rejeté sa demande, la requérante a formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.
Réglant l’affaire au fond, ce dernier indique que les documents dont la communication était sollicitée étaient pour partie des documents judiciaires qui ne pouvaient être communiqués.
Les autres documents étaient des documents administratifs en principe communicables sous réserve des occultations nécessaires.
Néanmoins, leur transmission impliquait la séparation des documents judiciaires et des autres documents, l’identification de l’ensemble des mentions à occulter, l’impression des documents et leur occultation manuelle des documents, puis leur dématérialisation.
Le Conseil d’Etat ajoute que compte tenu de cette charge de travail et des moyens réduits de la commune de 6000 habitants, ainsi que de l’intérêt limité de la communication pour la requérante, la commune a pu légalement refuser de procéder à la communication.
Il rejette donc les conclusions de la requérante.