CAA de NANTES, 28 février 2025, req. n°23NT03747e
La commune de Fouesnant a décidé d’acquérir plusieurs parcelles en centre-ville comprenant une maison d’habitation. La délibération autorisant cette acquisition a été contestée par un conseiller municipal.
Un premier jugement du Tribunal administratif de RENNES a annulé cette délibération. La commune a donc fait appel.
Il résulte des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques et du code général des collectivités territoriales qu’une consultation préalable des services de l’État est obligatoire pour les communes souhaitant acquérir des biens immobiliers.
En l’espèce, la commune de Fouesnant, pour l’acquisition du bien litigieux, avait sollicité l’avis de la direction départementale des finances publiques du Finistère qui a estimé que la valeur du bien immobilier s’élevait à 270 000 euros, hors coût de démolition avec une marge d’appréciation de 10%, soit un seuil haut de 297 000 euros.
Or, la délibération approuvée par le conseil municipal prévoyait une acquisition au prix de 350 000 euros, soit un prix supérieur de 17,84 % à la fourchette haute de l’estimation issue de l’avis des services de l’État réalisé en 2020 et de 29,6 % par rapport au prix estimé.
La commune arguait en défense que son prix était justifié, notamment au regard d’un deuxième avis en date du 20 octobre 2021 mentionnant pour le même bien un prix de 350 000 euros identique aux prix initialement décidé par la commune.
Cependant, la Cour va relever que cet avis est postérieur de dix mois à la délibération contestée et il n’indique pas que le premier avis était erroné, mais uniquement qu’il y a eu une demande de réexamen du dossier compte tenu de l’augmentation des prix des biens depuis le début de la crise sanitaire. Si la direction des finances publiques a donc revu à la hausse la valeur du bien et validé le prix négocié, il n’en demeure pas moins que l’écart entre le prix fixé par la délibération et le premier avis de la direction départementale des finances publiques était substantiel.
La Cour fait observer que si la commune avait produit un tableau faisant état de plusieurs ventes immobilières pour justifier le prix retenu, aucune date de transaction n’était indiquée ce qui ne permettait pas de comparer les prix.
Enfin si la commune arguait l’intérêt public « fort » justifiant l’achat des parcelles litigieuses, afin de lui permettre de créer une réserve foncière et agrandir son pôle culturel, la Cour va constater que le projet d’agrandissement n’en était qu’à ses prémices, le débat d’orientation budgétaire pour l’année 2020 se bornant à mentionner « qu’une réflexion devra par ailleurs être menée sur l’évolution de ses locaux qui se révèlent en partie inadaptés au regard du niveau de fréquentation des usagers et du confort de travail des agents ». La Cour va estimer que cet élément vient fortement relativiser l’intérêt public dont se prévaut la commune.
Ainsi, l’écart significatif entre le prix retenu par la commune et l’estimation faite par la direction départementale des finances publiques du Finistère en 2020 n’est pas justifié par un intérêt public local suffisant.
Pour tout ce qui précède, la commune est déboutée.
Cette décision rappelle un principe bien établi selon lequel une personne publique ne peut accorder des libéralités. En effet, la liberté contractuelle peut être limitée afin de préserver les deniers publics.