Les règles particulières d’administration de la preuve applicables dans un litige opposant un agent qui se déclare victime de harcèlement moral à son employeur (CE 23 déc. 2014, n°358340) ne doivent pas être mises en œuvre lors de poursuites disciplinaires contre un fonctionnaire auquel de tels agissements sont imputés.
Le Conseil d’État était saisi par l’Université de Poitiers d’un pourvoi contre une décision du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) statuant en matière disciplinaire.
Celui-ci avait relaxé un maître de conférences, que la section disciplinaire de l’université avait sanctionné pour harcèlement moral à l’égard de trois de ses collègues et manquement aux valeurs d’éthique, de responsabilité et d’exemplarité des enseignants-chercheurs.
S’agissant du harcèlement moral, le CNESER a constaté qu’il existait des tensions, devenues un conflit entre l’agent concerné et ses trois collègues, situation qui se traduisait par « des échanges vifs et des reproches réciproques », mais que ces éléments étaient insuffisants pour retenir cette qualification :
« En déduisant de ces éléments ainsi que du contexte de travail et des usages de la profession, qu’[il] a souverainement appréciés sans les dénaturer, que l’ensemble de ces faits étaient insuffisants pour caractériser l’existence d’une situation de harcèlement moral de M. A. à l’encontre de ses trois collègues, en dépit du caractère abrupt de l’attitude de M. A., le CNESER, statuant en matière disciplinaire, à qui il appartenait de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties, sans mettre en œuvre, contrairement à ce que soutient l’Université de Poitiers, le mécanisme probatoire particulier institué au profit des victimes d’agissements constitutifs de harcèlement moral, n’a pas commis d’erreur de droit et a suffisamment motivé son arrêt ».
Le second grief fait à l’agent était d’avoir présenté sa candidature à la direction d’un département, alors qu’il faisait l’objet de poursuites disciplinaires. Dès lors que ces poursuites n’avaient pas donné lieu à une sanction devenue définitive, il en avait tout à fait le droit, estime le Conseil d’État. Et le CNESER n’a pas inexactement qualifié les faits en considérant que cette candidature ne constituait pas un manquement aux valeurs d’éthique.