CE, 24 mars 2022, req. n°449826
Aux termes de plusieurs conventions conclues entre 1985 et 2019, une commune a confié à une association la gestion d’un musée de la photographie.
Par jugement du Tribunal de grande instance de Toulouse du 29 novembre 2019, l’association a été placée en procédure de sauvegarde judiciaire, convertie en procédure de redressement judiciaire par jugement de ce même tribunal du 14 février 2020.
Par une ordonnance du 5 octobre 2020, le juge commissaire du Tribunal judiciaire de Toulouse a sursis à statuer sur la requête en revendication de propriété des fonds photographique et documentaire ainsi que des œuvres exposées dans la galerie présentée par la commune et lui a enjoint de saisir la juridiction compétente aux fins de qualification juridique, d’une part, des conventions conclues entre elle et l’association et, d’autre part, des biens revendiqués.
Par un jugement du 2 février 2021, contre lequel la commune de Toulouse se pourvoit en cassation, le Tribunal administratif de Toulouse, saisi de la question préjudicielle, a, d’une part, qualifié les conventions conclues les 11 janvier 1985 et 4 mars 1987 de marchés publics et les conventions conclues les 5 janvier 1998, 6 janvier 2003 et 29 janvier 2008, ainsi que l’ensemble contractuel conclu à compter de 2013, de conventions d’objectifs et de moyens assorties de subventions et, d’autre part, a dit qu’il n’était pas en mesure de répondre à la question préjudicielle relative à la nature publique ou privée des biens en litige.
Après avoir rappelé la définition d’un marché public et d’un contrat de concession, le Conseil d’Etat relève qu’il ressort des stipulations de l’ensemble des conventions que,
si la commune a apporté des soutiens financiers significatifs et quantitativement importants à son cocontractant, celui-ci a toujours conservé un risque lié à l’exploitation de la galerie, son équilibre financier n’étant pas garanti par les sommes apportées par la commune.
L’association a ainsi supporté les aléas de la gestion du musée et a subi des pertes d’exploitation ayant conduit à son placement en procédure de redressement judicaire.
Ainsi, en jugeant que les conventions conclues entre l’association et la commune ne lui transféraient pas un risque d’exploitation et en en déduisant qu’elles ne constituaient pas des délégations de service public, le Tribunal administratif a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.
Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat juge que les conventions conclues entre la commune et l’association doivent être qualifiée de délégation de service public dès lors qu’outre un transfert du risque d’exploitation, l’association a assuré cette exploitation sous le contrôle de la commune de, qui a défini ses missions et objectifs en cohérence avec ceux de la politique culturelle municipale, veillé à ce que l’action et la communication de la galerie s’opèrent en coordination étroite avec les services de la commune et conditionné ses soutiens matériels et financiers à la production régulière de comptes rendus d’activité et états financiers.
Le Conseil d’Etat relève ensuite que les fonds photographique et documentaire dont la propriété est revendiquée par la commune ont été constitués pour les besoins de l’exploitation du musée, et notamment aux fins de réaliser des expositions ouvertes au public. Partant, ces biens doivent être qualifiés des biens de retour, propriété de la commune, dès lors qu’ils sont par suite nécessaires au fonctionnement de ce service public.