CE ord., 16 février 2024, n°491848
Par cette ordonnance, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur un référé-liberté formé contre un arrêté préfectoral ayant interdit un concert du rappeur Freeze Corleone.
Saisi en appel, le Conseil d’Etat rappelle que les atteintes à l’exercice des libertés fondamentales telles que la liberté de réunion doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées.
Lorsque l’objectif poursuivi par l’autorité de police administrative est la prévention de la commission d’infractions pénales, « la nécessité de prendre des mesures de police administrative et la teneur de ces mesures s’apprécient en tenant compte du caractère suffisamment certain et de l’imminence de la commission de ces infractions, ainsi que de la nature et de la gravité des troubles à l’ordre public qui pourraient en résulter ».
En l’espèce, la préfète du Rhône avait fondé l’interdiction sur les motifs tirés des propos antisémites ou homophobes contenus dans les paroles des chansons, ainsi que sur l’existence de paroles incitant à la haine et faisant l’apologie du nazisme et du terrorisme.
Elle avait par ailleurs relevé qu’il existait de sérieuses raisons de penser que la tenue du concert pouvait conduire à la commission d’infractions pénales et que les risques de troubles matériels à l’ordre public étaient élevés compte tenu des tensions locales liées aux retentissements de la guerre au Proche-Orient.
Le juge des référés de première instance avait rejeté le référé-liberté formé contre l’arrêté d’interdiction en indiquant qu’il existait un risque sérieux que soient portées de graves atteintes au principe de la dignité de la personne humaine compte tenu des paroles de plusieurs morceaux prévus pour être interprétés lors du concert.
Le juge avait également relevé que les morceaux susceptibles d’être interprétés pouvaient différer de ceux annoncés et que, compte tenu des actes antisémites et mouvements d’appel à la haine constatés localement, les risques de trouble à l’ordre public étaient caractérisés.
Le Conseil d’Etat estime qu’au regard de ces éléments, le juge des référés a pu estimer à bon droit que la préfète n’avais pas commis d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale en interdisant le concert.
Il rejette donc l’appel.