Cabinet Avocats Valadou I Josselin

L’encadrement des locaux destinés à la location de courte durée : un règlement local partiellement annulé

TA de Poitiers, 26 septembre 2025, req. n°2203180 ; 2301292

La Communauté d’Agglomération de la Rochelle a adopté un règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage permanent et temporaire des locaux destinés à l’habitation. Ce règlement a été modifié par deux délibérations du 20 octobre 2022 et du 9 mars 2023.

Ce règlement limite le bénéfice de l’autorisation de changement d’usage permanent à une par personne, et la subordonne à une compensation dans le centre-ville et deux autres quartiers identifiés. Cette compensation consiste, soit à offrir un local affecté à un usage autre que l’habitation d’une surface de plancher équivalente, soit à acquérir des droits de commercialité auprès des propriétaires qui souhaitent modifier l’affectation de locaux pour les destiner à un usage d’habitation.

Saisie d’un recours en annulation contre ces deux délibérations par l’association Union nationale de la propriété immobilière, la chambre syndicale des propriétaires et des copropriétaires de la Rochelle et l’Aunis, le tribunal administratif a dû se prononcer sur la légalité de chacune des deux délibérations.

S’agissant de la version du règlement adopté par la délibération du 20 octobre 2022, le tribunal relève d’abord que le secteur géographique concerné est marqué par une pénurie de logements disponibles à la location de longue durée. Il retient ainsi que la limitation des autorisations d’usages est nécessaire et justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général.

Le tribunal administratif relève ensuite que la limitation de l’autorisation à une par personne, à une compensation dans certains quartiers, et l’interdiction de délivrer une autorisation de changement d’usage pour les logements d’une surface habitable inférieure à 35m2, constituent des restrictions importantes à l’activité de location de locaux meublés pour de courtes durées. Le tribunal a jugé ses restrictions disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi relatif à la lutte contre la pénurie de logement, en annulant ainsi le règlement adopté par la délibération du 20 octobre 2022.

S’agissant de la nouvelle version du règlement adopté par la délibération du 9 mars 2023, le tribunal a relevé que les conditions de délivrance d’une autorisation de changement d’usage permanent sont suffisamment proportionnées au regard de la tension du marché immobilier des locations à longue durée.

Il considère également que le mécanisme de compensation auquel le règlement subordonne la délivrance d’une telle autorisation dans trois quartiers, dont le centre-ville, est proportionné dans la mesure où il est restreint géographiquement aux secteurs les plus touchés par l’expansion des locations touristiques.

Le tribunal administratif a finalement annulé partiellement le règlement dans sa version du 9 mars 2023, mais seulement en ce qu’il exclut les personnes morales du régime d’autorisation temporaire de changement d’usage. Il considère ainsi :

« Il ne ressort pas des pièces du dossier (…) que la différence ainsi faite entre personnes physiques et personnes morales serait fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi. Dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que ces dispositions et, par suite, le règlement en litige, introduisent une discrimination incompatible avec (…) l’article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».

On notera toutefois qu’à la date de la délibération litigieuse, l’autorisation de changement d’usage n’était pourtant possible que pour les personnes physiques.

Depuis 2024, ces autorisations temporaires sont possibles pour les personnes physiques et morales.

Il convient donc de prendre garde, eu égard à cette jurisprudence, à ce qu’un règlement qui limite les autorisations aux seules personnes physique ou morales soit en rapport avec le but de la loi pour ne pas être censuré.