Cabinet Avocats Valadou I Josselin

Précisions sur les modalités de report des droits à congés annuels des agents publics empêchés pour des motifs médicaux ou familiaux et sur l’obligation d’information incombant à l’employeur.

CE, 17 octobre, 2025, Union fédérale des syndicats de l’Etat CGT, req. n°495899

L’Union fédérale des syndicats CGT a contesté le refus d’abroger des dispositions du décret de 1984 sur les congés annuels.

En effet, celle-ci reprochait aux articles 1 et 5 du décret litigieux de limiter trop strictement le report des congés et d’exclure toute indemnisation, et ce sans tenir compte des agents empêchés de prendre leurs congés pour raisons médicales ou familiales, ni exiger que l’administration les informe de leur droit au report.

En effet, les articles 1 et 5 du décret de 1984 disposent respectivement que « tout fonctionnaire de l’Etat en activité a droit, dans les conditions et sous les réserves précisées aux articles ci-après, pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, à un congé annuel d’une durée égale à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service » et que « le congé dû pour une année de service accompli ne peut se reporter sur l’année suivante, sauf autorisation exceptionnelle donnée par le chef de service. Un congé non pris ne donne lieu à aucune indemnité compensatrice ».

Cependant, en cours d’instance, un décret du 21 juin 2025 a introduit un nouvel article 5-1, lequel prévoit un régime de report des congés non pris pour raisons de santé ou familiales ainsi qu’une indemnité compensatrice en fin de relation de travail.

De ce fait, une partie des demandes du syndicat était satisfaite menant, sur ce point, à un non-lieu à statuer.

En revanche, les demandes visant l’obligation d’information de l’agent n’ont pas été satisfaites et demeuraient à juger.

Saisi en cassation, le Conseil d’Etat a au préalable rappelé les dispositions européennes, selon lesquelles « les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail ».

En se fondant sur la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne, le Conseil d’Etat a jugé que « le droit au congé annuel payé qu’un travailleur n’a pas pu exercer pendant une certaine période parce qu’il était placé en congé de maladie, en congé de maternité, en congé de paternité et d’accueil de l’enfant ou en congé d’adoption pendant tout ou partie de la période en cause, ne peut s’éteindre à l’expiration de celle-ci et que le travailleur qui n’a pu, pour cette raison, exercer son droit au congé annuel payé a droit à une indemnité financière en fin de relation de travail.

En outre, l’extinction de ces droits à l’expiration de la période de référence ou d’une période de report fixée par le droit national n’étant possible qu’à la condition que le travailleur ait effectivement été mis en mesure d’exercer son droit au congé annuel payé, il incombe à l’employeur de l’informer, de manière précise et en temps utile, des conditions dans lesquelles il risque de perdre ses droits à congés ».

Autrement dit, les congés non pris pour raisons de santé, maternité, paternité ou adoption doivent être conservés ou indemnisés, et ils ne peuvent être perdus que si l’employeur a effectivement informé l’agent de ses droits et des risques de leur perte.

En l’absence de cette information, les congés restent dus ou doivent être indemnisés en fin de relation de travail.

Dans ces conditions, le Conseil d’Etat a annulé la décision refusant d’abroger les articles 1 et 5 du décret de 1984, en tant qu’ils ne subordonnent pas l’extinction de droits aux congés annuels ou celle du droit à leur indemnisation lorsqu’ils n’ont pas pu être pris, à l’information de l’agent par l’employeur portant sur le nombre de jours de congé dont il dispose à la suite de leur report en raison d’un de ces congés, ainsi que sur la date jusqu’à laquelle ces jours de congés peuvent être pris.